Entre nos mains

Entre nos mains


VENDREDI 11 MAI 2012 (20 H


RWANDA, UN CRI D'UN SILENCE INOUI


Documentaire de Anne Lainé


France ; 2003 ; 52 minutes ;


Prix du jury lycéen au festival du film d'Histoire, Pessac en 2003 et le prix du meilleur film pour la Mémoire des Droits de l'Homme au festival International des Droits de l'Homme en en 2004.

Synopsis : Au Rwanda, neuf ans après le génocide des Tutsi, les souffrances qu'endurent des centaines de milliers de personnes rescapées du génocide entravent les stratégies de reconstruction de la société.  Les  coups  de  machettes ont blessé, mutilé, le viol systématique des femmes et des petites filles a propagé le sida, et partout il y a cette plaie béante qu'est la souffrance traumatique. En se si- tuant délibérément sur le terrain de la subjectivité des victimes, ce film fait entendre   un   cri   qui   n'eut comme écho à l'époque que le silence inouï de la communauté internationale.

ANNE LAINE


Anne Lainé commence des études de médecine puis s'oriente vers le cinéma. Diplômée de l'Institut des Hautes Etudes Cinématographiques - IDHEC -, elle travaille d'abord comme première assistante de réalisation et monteuse au cinéma, scripte à la télévision. Elle réalise des courts-métrages de fiction et des bandes d'art vidéo projetées dans de nombreux festivals internationaux au début des années 80. Son intérêt pour la psychiatrie ainsi que pour la fiction, tant littéraire que cinématographique, l'a amenée à réaliser des portraits  - notamment ceux de Naguib Mahfouz et de Nadine Gordimer - et des documentaires qui lui ont permis d'affiner son regard sur la part d'ombre de notre humanité, ainsi que sur les dilemmes et les choix auxquels les individus sont confrontés.

Rwanda, un cri d'un silence inouï a reçu le Prix du jury lycéen au festival du film d'Histoire, Pessac en 2003 et le prix du meilleur film pour la Mémoire des Droits de l'Homme au festival International des Droits de l'Homme en en 2004.

EXTRAITS CRITIQUES


«Béatha, Joséphine et Solange ont vu et vécu l'indicible. Comme des centaines de milliers de rescapés, blessés, mutilés, violés,  dont  les  proches ont été torturés, massacrés sous leurs yeux par des tueurs  qui  étaient  aussi des pères, des mères, des religieux, des instituteurs... elles font des « rêves traumatiques » où elles  revivent  le  passé avec un réalisme total. Devant la caméra d'Anne Lainé, elles disent leur calvaire sans colère, presque sans affect - quand une émotion affleure, Béatha s'excuse. La réalisatrice filme avec respect et sensibilité le douloureux cheminement de la parole.»

Thérèse-Marie Deffontaines.

(Le Monde : 20/03/2004)

PROPOS DE LA REALISATRICE


« Ce film était le pilote d'une collection que nous avions développée, Victor Cohen Hadria, Georges Kapler et moi-même, intitulée « Seuls les papillons franchissent les barbelés ».

Cette collection, destinée à la télévision, donc à un très large public, traitait du poids des séquelles traumatiques longtemps après les guerres et les génocides qui les avaient provoquées, quand l'aide humanitaire de première urgence s'en est allée et que les pays se trouvent à reconstruire les infrastructures aussi bien que les individus.

En nous appuyant sur le travail de psychiatres et psychothérapeutes travaillant sur la question du traumatisme et de la mémoire, nous nous adressions à la subjectivité des témoins afin de montrer ce que représente pour un seul être humain ce qu'on appelle un crime contre l'humanité.

C'est ainsi qu'en tournant avec les rescapés du génocide des Tutsi, j'ai choisi de créer la proximité entre la victime et le spectateur. Je voulais que celui-ci retrouve dans ces récits une part de son imaginaire, un peu de sa propre identité. Alors on pouvait espérer que les victimes cesseraient d'être des foules anonymes et lointaines, que le spectateur cesserait d'être indifférent et ainsi se reconnaîtrait comme appartenant à la même communauté humaine.

Le regard sur l'Autre, dans notre cas, c'était aussi prendre en considération le fait que ces femmes parlaient essentiellement pour un public français. Cela a certaine- ment déterminé beaucoup de mon positionnement et de mes choix. À la suite du long entretien qu'elle nous avait accordé, Béatha nous a confié : « vous m'avez enlevé une part de la haine qui me tuait ». Pour Béatha, le fait que son témoignage soit en- tendu par des citoyens français pouvait certes atténuer cette haine, mais aussi donner du sens et en l'occurrence créer du lien. Lors des projections du film, j'ai pu constater combien les paroles de Béatha questionnaient et bouleversaient les spectateurs. »